Un
Le 20 mars 2010, un volcan islandais entre en éruption. A priori, rien d’exceptionnel car les éruptions volcaniques sont un phénomène naturel connu, pour ne pas dire habituel, en Islande. Mais Eyjafjöll(1) a décidé de jouer un bien mauvais tour au monde occidental et à son industrie aéronautique. Si en Islande les répercussions de l’éruption sont mineures(2), il n’en a pas été de même dans le reste de l’Europe.
La colère de Eyjafjöll a provoqué la formation d’un important panachage volcanique(3) que les vents ont rabattus sur l’Europe continentale causant d’importantes perturbations dans le transport aérien.
Les réacteurs des avions n’étant pas certifiés contre les effets de la cendre volcanique, la prudence a été de mise avec l’annulation de milliers de vols et la fermeture de plusieurs espaces aériens dans de nombreux pays(4). Les conséquences sont mondiales et toute l’économie-monde en souffre. L’Association Internationale des Transports Aériens estime le préjudice à 1,27 milliards d’euros pour les seules compagnies aériennes. Des millions de voyageurs ont été bloqués dans les aéroports, 7 millions de voyageurs pour la seule journée du 19 avril à travers 313 aéroports dans le monde.
Ce phénomène naturel exceptionnel et la catastrophe économique induite posent plusieurs questions sur notre mode de vie, notre dépendance vis-à-vis de notre environnement et les limites de notre développement technologique, insoutenable pour des raisons écologiques et sociales.
Des équilibres fragiles
Le fonctionnement de notre société suppose une disponibilité à 100 % de la nature. Notre société de technique et de consommation d’énergie à haute dose nous donne l’impression que nous dominons tout alors que nous dépendons totalement de notre environnement comme l’a démontré l’éruption d’Eyjafjöll.
Cet avertissement ne doit pas être balayé mais analysé. Cet événement nous amène à plus d’humilité et de simplicité et nous fait prendre conscience des excès du capitalisme. Cette pédagogie de la catastrophe doit aussi se coupler à la compréhension de l’absurdité du capitalisme.
Une parenthèse décroissante ?
Si Eyjafjöll se montre un bon pédagogue de la catastrophe, ses conséquences matérielles ne peuvent être assimilées à une parenthèse décroissante car elle fut une obligation et non un choix. Nous ne sommes pas dans une décroissance choisie et démocratiquement organisée car nous avons vécu une décroissance subie du trafic aérien (frustrante pour les personnes bloquées dans les aéroports), du gaspillage de l’énergie fossile dont nous dépendons, et par contrecoup, des échanges commerciaux délocalisés.
A l’inverse, notre objectif est d’éviter que la contrainte naturelle nous impose des choix de façon autoritaire. La décroissance ne se fera qu’après s’être imposée dans les esprits. Les décisions politiques allant dans ce sens faciliteront le choix démocratiquement exprimé.
Un avertissement pour réfléchir
Si aujourd’hui, un phénomène naturel a bloqué temporairement l’aviation, demain, ce sera le cas mais de façon plus définitive avec la pénurie de pétrole qui s’amorce. Notre mode de vie n’est pas soutenable et généralisable à l’ensemble de la planète. Cette éruption du volcan islandais nous amène à nous questionner sur notre mode de vie, fondé sur le besoin de consommer et le mouvement perpétuel qui en découle, notamment et principalement pour les occidentaux. L’aviation est une facilité pour les riches occidentaux et stigmatise le pillage des ressources naturelles de la planète à leur seul profit. Ce sont bien les occidentaux qui ont le plus souffert du blocage de la navigation aérienne car ce sont eux qui possèdent des emplois nécessitant des déplacements rapides et lointains ou qui assimilent les vacances au fait de partir loin mais vite. Prendre l’avion est devenu un acte anodin mais nous sommes en train de nous piéger dans notre folie du toujours plus. Que d’articles et de reportages pour pleurer sur le sort des occidentaux bloqués dans les aéroports climatisés (!), mais beaucoup moins pour réagir aux conséquences dramatiques de la navigation aérienne sur la planète.
L’aviation est un outil de la mondialisation économique comme il a été un grand progrès au niveau des combats militaires. L’aviation est un pollueur majeur qui a permis la rapidité des échanges et facilité la domination du Nord sur le Sud. L’aviation, c’est l’adage olympique « plus vite, plus haut et plus fort » au détriment de l’environnement et d’une vie sobre. C’est également un adversaire à la relocalisation des activités, qui est au cœur du projet de la Décroissance.
Prenons le temps de réfléchir pour que cet avertissement permette à la Décroissance d’anticiper les crises à venir afin d’éviter la barbarie.
Nier l’environnement conduit à l’échec
Parti Pour La Décroissance
télécharger le document en pdf
(1)Nom du volcan qui est entré en éruption le 20 mars 2010
(2) Quelques fermes ont été détruites, des routes ont été défoncées et environ 500 habitants ont été évacués.
(3) Nuage de cendres et de gaz volcaniques
(4) Belgique, Norvège, Danemark, Irlande, Royaume-Uni, France, Russie, pays de l’Europe de l’est …
Dessins extraits respectivement de Siné-Hebdo et de Charlie-Hebdo sans l’aimable autorisation de leur auteurs. Qu’ils en soient remerciés.
Le Volcan d’Auvergne et dédicacé à l’auteur initial de ce texte