Jacques
(source dessin : http://www.reporterre.net/spip.php?article4001)
Décroissance contre décroissance
La Décroissance n’est pas la décroissance de tout pour tous. Vouloir la décroissance pour la décroissance serait tout aussi absurde que de vouloir la croissance pour la croissance.
Ce que nous appelons Décroissance est avant tout un slogan. Un mot-obus dont le but est de provoquer un électrochoc dans la pensée dominante. Mais, c’est aussi et surtout un mouvement de pensée qui dépasse la signification initiale du terme de décroissance.
La Décroissance ne prône en rien un retour en arrière vers un pseudo-bonheur perdu. Nous ne refusons pas le progrès technologique, simplement nous le questionnons, nous aimerions lui donner du sens et, surtout, lui donner une dimension humaine. Nous ne regrettons pas hier mais regrettons aujourd’hui et avons peur pour demain.
Notre modèle de développement n’est pas soutenable ni souhaitable. C’est pour cela que nous affirmons que ce sont bien nos sociétés occidentales qui vont devoir modifier leurs modes de vie. Et que les populations des pays dits émergents ou du Sud auraient intérêt à ne pas chercher à s’inspirer de l’occident.
Une pensée émancipatrice mais contre la pensée unique
La Décroissance se veut, avant tout, porteuse d’une pensée positive. Par la force des choses, cette pensée s’est construite contre la pensée dominante, celle portée par la capitalisme qu’il soit brun, vert ou soi-disant démocratique. En effet, on ne peut faire l’économie d’un constat sur les crises actuelles traversée par nos sociétés de croissance pour construire un projet de décroissance. Cette pensée unique, tellement ancrée dans nos imaginaires, nécessite un effort de réflexion, de remise en cause considérable individuellement et collectivement, car il faut qu’elle soit dé-construite.
Ainsi, la Décroissance forme un ensemble de propositions émancipatrices : Dotation Inconditionnelle d’Autonomie couplée à un Revenu Maximum Acceptable ; relocalisation ouverte, démocratie réelle, … qui nécessite de revoir nos déplacements, notre alimentation, nos activités, notre habitat c’est-à-dire de s’opposer à un existant ni soutenable et ni souhaitable.
L’opposition à NDDL, c’est s’opposer au vieux monde, c’est vouloir d’autres mondes
C’est pour toutes ces raisons que nous nous opposons à l’aéroport de NDDL, projet qui ne répond pas aux problèmes du présent et persiste dans une logique passéiste d’un monde dans lequel les ressources énergétiques seraient infinies et la pollution, une illusion…
Croissance verte & Développement durable : la croyance que ce système fonctionne bien pour tout, et pour tout le monde !
Sachez Monsieur Auxiette que la croissance ne peut être maîtrisée, ni ses « richesses » mieux redistribuées. La croissance aura toujours besoin de toujours plus de ressources. Croire qu’en augmentant les richesses produites, « on augmente la possibilité d’offrir à chacun ce dont il a besoin pour couvrir ses besoins. »(p86) reste purement conceptuel ! Prôner la croissance comme unique solution pour la résilience de nos territoires, c’est comme cautionner la fabrication des mines antipersonnelles pour créer de l’emploi dans les pays en voie de développement ! La question n’est pas « combien » nous sommes en capacité de produire, mais qu’est-ce que l’on produit, comment et pourquoi ?
De la même façon, la croissance s’appuie sur l’exploitation de l’homme par l’homme, et de tous sur la nature. Quand on sait que 20% de la population mondiale consomme plus de 80% des ressources planétaires, comment peut-on se gausser « des réussites nombreuses de l’Europe » notamment en matière de paix ? Nous avons juste déplacé les rapports de forces hors de nos territoires…
M. Auxiette, pouvez-vous délibérément oublier les laissés pour compte de la croissance, qu’ils soient en France, en Espagne, en Grèce ou dans les pays du sud, que pourtant nous exploitons honteusement depuis des décennies ? Si le premier budget de dépenses au niveau international n’était pas celui de l’armement, 850 millions d’individus ne souffriraient certainement pas de mal-nutrition actuellement. Si le choix politique était fait au niveau mondial de couvrir l’ensemble des besoins de la population, on ne serait déjà plus en train d’en débattre. Ce serait effectif. Comment peut-on ignorer à ce point, que les pics de productions que ce soit d’énergie, de minerais ou encore le danger de l’artificialisation des terres arables ne sont plus contredits par aucun « expert », tout comme les nuisances environnementales de l’activité économique en croissance sur notre éco-système ?
Nous ne sommes pas pour autant malthusien ; comme nous aimons à le répéter de façon provocante : « le problème n’est pas le nombre d’humains, mais le nombre d’automobilistes ».
La Décroissance, la voie de l’intelligence collective au service de touTEs
« Quelle que soit la vitesse que l’on peut atteindre en vélo, si on arrête de pédaler, il y a bien un moment où l’on chute ! » (p83), nous sommes d’accord avec vous M. Auxiette, mais ce n’est pas une raison pour pédaler dans n’importe quelle direction ! Le système capitaliste n’est pas pérenne. Pourquoi spéculer sur de soi-disant besoins futurs pour la population ?
M. Auxiette, ce que vous proposez, c’est d’accélérer un mouvement destructeur qui laisse toujours plus de population dans la misère et dans un environnement détruit par nos actes irréfléchis, à l’opposé des « notions d’égalité et de solidarité internationale […] » (p84) …
M. Auxiette, ce que nous proposons, c’est d’anticiper la décrépitude qui accentuera les inégalités et les violences. « Demain reste à construire plutôt qu’à prévoir » (p81) ? Et bien, allons-y. Nous pourrions imaginer qu’entre le pillage de la planète et le retour à la bougie, il soit possible de sortir de la caricature mortifère par une troisième voie, celle de l’intelligence collective au service de touTEs : humains, biodiversité, territoires, etc. Nous désirons ouvrir les chemins vers une transition choisie, et définir démocratiquement des mondes soutenables et souhaitables.